Contrairement à une idée reçue selon laquelle l’Algérie aurait été « créée » par la colonisation française en 1830, il est essentiel de rappeler que l’Algérie, sous la forme de la Régence d’Alger, existait bien avant l’invasion française. Entre 1516 et 1830, la Régence d’Alger était un État semi-autonome de l’Empire ottoman, gouverné par ses propres institutions, dirigeant son territoire et jouant un rôle clé dans la géopolitique méditerranéenne. Ce territoire, qui couvrait l’actuelle Algérie, avait une histoire et une identité bien établies avant l’arrivée des colons.
La Régence d’Alger : Un État souverain sous protection ottomane
La Régence d’Alger a été fondée en 1516 par les frères Barberousse, des corsaires originaires de l’Empire ottoman, qui ont libéré la ville d’Alger des Espagnols. Bien que la Régence soit formellement rattachée à l’Empire ottoman, elle conservait une autonomie interne importante, avec un pouvoir exercé par un Dey, un chef d’État élu localement. Cette forme de gouvernement conférait à la Régence d’Alger un statut de semi-indépendance, gérant ses affaires internes sans ingérence directe de l’Empire ottoman.
La régence n’était donc pas un simple territoire dominé par un empire étranger, mais bien un État structuré avec ses propres institutions, ses lois, et une armée puissante, notamment grâce à sa flotte corsaire. Cette dernière jouait un rôle crucial dans les affaires méditerranéennes, souvent en conflit avec les puissances européennes, ce qui témoigne de la souveraineté de l’État algérien à l’époque.
Un État au cœur des conflits maritimes en Méditerranée
La Régence d’Alger est surtout connue pour sa flotte corsaire, qui menait des campagnes en Méditerranée et dans l’Atlantique. Ces activités corsaires étaient une source de revenus pour l’État, mais elles ont également conduit à de nombreux conflits avec les nations européennes et américaines. Alger était en effet un acteur important de la région, imposant des tributs aux puissances maritimes en échange de la sécurité de leurs navires.
Les États-Unis, nouvellement indépendants au début du XIXe siècle, furent confrontés à ces demandes de tributs de la part de la Régence d’Alger et d’autres États barbaresques, ce qui les mena à deux conflits : la Première guerre barbaresque (1801-1805) et la Seconde guerre barbaresque (1815). Ces guerres symbolisaient les efforts des puissances étrangères pour mettre fin à la domination maritime de la Régence d’Alger, qui jouait un rôle de puissance souveraine en Méditerranée.
La Régence d’Alger avant l’arrivée des Français
Il est crucial de noter que la Régence d’Alger fonctionnait comme un État indépendant bien avant l’invasion française de 1830. L’État avait une économie stable, principalement basée sur les échanges commerciaux et les activités corsaires. Ses institutions politiques étaient bien établies, avec une société hiérarchisée et une administration locale gérée par le Dey d’Alger.
En 1795, un traité de paix signé entre la Régence d’Alger et les États-Unis obligeait les Américains à payer un tribut pour protéger leurs navires des attaques corsaires. Cela montre que la Régence, loin d’être un simple protectorat de l’Empire ottoman, était perçue comme un acteur diplomatique et militaire à part entière.
La fin de la Régence d’Alger et la colonisation française
L’invasion française en 1830 mit fin à la Régence d’Alger après plus de 300 ans d’existence, marquant le début de la colonisation de l’Algérie. Toutefois, il est fondamental de se rappeler que l’Algérie, sous la forme de la Régence, avait une identité politique et historique bien avant l’arrivée des colons français. La Régence d’Alger n’était pas un territoire sans structure, mais bien un État organisé, reconnu et craint par les puissances de l’époque.
Cette invasion marqua non seulement la fin de la Régence, mais aussi le début de 132 ans de colonisation française, jusqu’à l’indépendance de l’Algérie en 1962.
La Régence d’Alger, loin d’être une simple région sous contrôle ottoman, était un État indépendant avec ses propres institutions et son rôle sur la scène internationale. La colonisation française n’a donc pas « créé » l’Algérie, mais a mis fin à un État souverain qui existait depuis plusieurs siècles. Reconnaitre cet héritage est essentiel pour comprendre la profondeur historique de l’Algérie en tant qu’entité politique avant la colonisation.